Antaios révolutionne les mémoires

Rapides, endurantes et non volatiles, les mémoires magnétiques SOT MRAM développées par Antaios, start-up issue du laboratoire Spintec*, pourraient être déployées dans toute une panoplie d’applications…
Face à la multiplication des objets connectés, réduire la consommation énergétique est devenu un enjeu majeur pour les industriels de la micro-électronique. Dans cette perspective, la startup Antaios, fondée par Jean-Pierre Nozières, diplômé de Grenoble INP – Ense3 et ancien directeur du laboratoire Spintec, développe une technologie de mémoire très innovante : la SOT-MRAM. Non volatile, rapide et peu énergivore, celle-ci pourrait remplacer progressivement les mémoires Flash et SRAM dans les systèmes embarqués et les processeurs par exemple.

La Spin Orbit Torque MRAM est une mémoire non volatile magnétique. Plutôt que d’être stockées sous forme de charges comme dans les mémoires classiques à base de semi-conducteurs, les données des mémoires magnétiques sont stockées sous la forme de l’orientation de l’aimantation dans une couche magnétique qui fait office de nano-aimant. Elles sont de ce fait intrinsèquement non-volatiles, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas besoin d’une alimentation électrique continue pour conserver leur information, ce qui les rend attractives pour les applications ultra-basse consommation comme les objets connectés.

Dans les premières générations de mémoires magnétiques, l’orientation des spins est manipulée par un champ magnétique induit par un courant circulant dans un conducteur adjacent au point mémoire. Malheureusement, cette solution impossible à miniaturiser atteint aujourd’hui ses limites en termes d’applications. Aussi, les MRAM actuellement sur le marché utilisent-elles le principe de manipulation d’aimantation par transfert de spin (Spin Transfer Torque - STT), qui permet de coder l’information en faisant passer un courant directement à travers l’élément de stockage magnétique, sans manipuler de champs magnétiques.
Cependant, les forts courants circulants dans les composants peuvent entrainer un vieillissement prématuré du dispositif, d’autant plus que la vitesse d’opération est élevée. Si ces mémoires sont adaptées aux applications fonctionnant à basse fréquence, elles pêchent pour les applications nécessitant plus de rapidité.
 

Le principe de spin orbite torque à la rescousse…


C’est là qu’intervient le principe de SOT, développé par Antaios. « A Spintec, les chercheurs avaient découvert qu’en faisant passer le courant non pas à travers, mais sous les points mémoires, en choisissant bien les matériaux, il était possible d’inverser l’orientation du spin des électrons par effet de spin orbite torque, explique Jean-Pierre Nozières L’avantage, c’est qu’il n’y a plus de stress électrique sur le point mémoire magnétique, ce qui augmente considérablement leur durée de vie. » En permettant simultanément une vitesse de fonctionnement élevée et un nombre de cycles de lecture et d’écriture infinis, la technologie SOT a le potentiel pour remplacer à la fois les mémoires non volatiles embarquées (aujourd’hui les mémoires NOR-Flash) et les mémoires caches intégrées (SRAM) dans les microcontrôleurs, les microprocesseurs et les systèmes sur puce (System on Chip). Les marchés potentiels sont immenses : internet des objets, téléphonie mobile, intelligence artificielle, stockage de masse, etc.

Le concept est tellement prometteur que les investisseurs viennent d’accorder à la start-up un financement conséquent, lequel, ajouté au prix du concours d’innovation i-Lab remporté par Jean-Pierre Nozières en 2016 (11 millions de dollars au total), lui permettra de s’entourer de partenaires majeurs du domaine pour mettre sa technologie sur le marché. « Ce financement est une étape clé pour Antaios. Il affirme la valeur de notre technologie et l’intérêt de l’industrie pour la mémoire SOT qui représente la nouvelle génération de mémoires MRAM, et qui résout les limites des technologies actuelles. » Bon vent !

*CEA, CNRS, IRIG, Grenoble INP, UGA