energie renouvelable

Hydrogène : l’activation magnétique dope l’électrolyse alcaline

Tandis que le gouvernement vient d’annoncer son plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique, les chercheurs du LEPMI* ont réalisé une avancée majeure en mettant au point l’activation magnétique de l’électrolyse alcaline. Leurs travaux ont été publiés dans la prestigieuse revue Nature Energy.
Composé de deux atomes d'hydrogène, le dihydrogène (communément appelé hydrogène) est particulièrement énergétique : 1 kg de dihydrogène libère environ trois fois plus d'énergie que la même quantité d'essence. De plus, lorsqu'il est produit à partir de ressources renouvelables, il est considéré comme non polluant. Ainsi, les rejets d'un véhicule à hydrogène sont composés uniquement d'eau, sans aucune trace de particule nocive ou de CO2. Cependant, l’hydrogène est à l’heure actuelle majoritairement produit par vaporeformage, une technique qui émet de grosses quantités de gaz à effet de serre.

Parmi les techniques ouvrant la voie à un hydrogène « vert », figure l’électrolyse. Ce procédé consiste à décomposer des molécules d’eau à l’aide d’un courant électrique (provenant idéalement d’énergies renouvelables), pour obtenir de l’oxygène (O2) et de l’hydrogène (H2). L’électrolyse alcaline à circulation d’électrolyte est la plus utilisée actuellement (avec de l’électricité d’origine non-renouvelable), mais elle n’est pas adaptée au couplage avec de l’énergie photovoltaïque ou éolienne. L’électrolyseur doit en effet être chauffé à 80°C pour que l’électrolyse soit efficace, ce qui est difficilement compatible avec un fonctionnement intermittent.

Ne chauffer que là où c’est nécessaire


Pour pallier ce problème, les chercheurs du LEPMI ont eu l’idée de cibler le chauffage là où il est nécessaire, c’est-à-dire au niveau du catalyseur, grâce à l’activation magnétique. Utilisée en médecine pour détruire les cellules cancéreuses, l’hyperthermie consiste à utiliser un matériau magnétiquement sensible, qui chauffe lorsqu’il est immergé dans un champ magnétique (un peu comme dans un micro-ondes). « L’activation magnétique est due à la transformation locale d’un champ magnétique alternatif haute fréquence en chaleur grâce à des nanoparticules magnétiques », explique Marian Chatenet, chercheur au LEPMI et l’un des principaux auteurs de ces travaux. « Avec les collègues du LPCNO**(Toulouse), nous avons donc développé un catalyseur composé de nanoparticules de carbure de fer, revêtues d’une couche de nickel. Cette architecture permet de chauffer le cœur du catalyseur, dont la nature est choisie en fonction de la température maximale que l’on souhaite atteindre, et donc d’atteindre une température en surface du catalyseur contrôlée et beaucoup plus élevée qu’en électrolyse classique. » Outre les économies d’énergie qu’elle permet de réaliser en ne chauffant que très localement et en abaissant en conséquence les surtensions de réaction, cette méthode présente l’avantage de préserver le reste de la cellule d’électrolyse de réactions parasites rédhibitoires (qui sont accélérées par une élévation de température).

Avec le soutien du groupe industriel énergétique Engie, les chercheurs ont apporté une preuve de concept en adaptant une cellule d’électrolyse classique de manière à la faire entrer dans une bobine et à pouvoir effectuer des mesures électrochimiques sous champ magnétique. Grâce à ce démonstrateur, ils ont prouvé que l'activation magnétique améliorait considérablement l'activité électrocatalytique et la cinétique de la réaction. Le projet ANR Hy-walHy, qui vient de débuter en collaboration avec l’UGA et le LPCNO, permettra de concevoir une cellule compatible avec une mise en œuvre industrielle et d’améliorer encore les performances. Les résultats obtenus sur la cellule expérimentale laissent présager une véritable avancée technologique.


*LEPMI : Laboratoire d'Electrochimie et de Physicochimie des Matériaux et des Interfaces (Grenoble INP, UGA, CNRS, Université Savoie Mont-Blanc)
**LPCNO : Laboratoire de Physique et chimie des Nano-Objets (CNRS, INSA Toulouse, Université de Toulouse)