Grenoble INP Rubrique Recherche 2022

Décontamination des eaux sans produit chimique : une nouvelle voie d’oxydation des polluants par la cavitation

Le Cremhyg, centre de recherche et d’essais de machines hydrauliques de Grenoble, développe des procédés de traitement des eaux par cavitation hydrodynamique et par onde de pression, en partenariat avec le pôle de compétitivité chimie Axelera.
Déchets, pollution - © Igor Jandric - Fotolia
Dans quel contexte sont menées ces recherches ?
Claude Rebattet, directeur du Cremhyg : L'un des enjeux majeurs en matière de développement durable est la protection de la ressource en eau. Les techniques actuellement mises en œuvre sont efficaces, mais face à des polluants de plus en plus complexes et résistants à l'atténuation naturelle comme les solvants organochlorés, d'autres techniques doivent être développées. Parmi ces nouvelles technologies, on trouve les techniques d'oxydation avancées. Malheureusement, parmi celles-ci, nombreuses sont celles qui sont consommatrices de produits chimiques. L'objectif est donc de développer des technologies qui soient à la fois respectueuses de l'environnement et industriellement viables. Dans ce contexte, la cavitation hydrodynamique, et plus généralement les méthodes physiques (traitement par rayonnements UV ou par ultrasons) apparaissent comme des alternatives possibles aux méthodes chimiques.
Comment ça marche ?
Cavichoc : adaptés au polluants non volatils déposés sur des sédimentsC. R. : Le principe de traitement par cavitation hydrodynamique consiste à produire des réactions de dissociation des molécules organiques et des composants volatiles par l'effet de collapses de bulles. En créant une dépression, nous amenons, à température constante, l'eau liquide à sa pression de vaporisation. Des bulles de vapeur se forment, dans lesquelles migrent les polluants volatiles. Quand la pression remonte, les bulles collapsent. Les molécules d'eau (H2O) se dissocient alors en hydrogène (H) et en hydroxyle (OH°), lequel oxyde le polluant. Cette réaction peut s'accompagner d'un effet de pyrolyse qui favorise cette dissociation. En cas de présence, dans l'eau, de composés organiques non-volatiles, on utilise une méthode alternative qui consiste à soumettre les polluants à des ondes de pression violentes qui les décomposent : cavitation par chocs. Deux procédés basés sur la cavitation hydrodynamique et la cavitation par chocs sont actuellement en développement dans le cadre de contrats ANR et projet FUI (Fonds unique interministériel). Ils sont réalisés en partenariat avec Ylec Consultants et le porteur industriel : SITA Remédiation, filiale de Suez Environnement, spécialiste dans le traitement des sols pollués et la valorisation des sites.
Quel est l'apport du Cremhyg dans le développement de cette technologie ?
C. R. : D'un point de vue scientifique, notre objectif est de préciser les mécanismes hydrodynamiques intervenant dans les processus de collapse des bulles et de dissociation moléculaire des solvants et autres polluants. D'un point de vue industriel, le projet vise à caractériser l'efficacité énergétique et la rentabilité économique en vue de l'élimination des polluants dans les nappes phréatiques et dans les sols. Dans le programme Cavhyte, la cavitation se produit dans une canalisation équipée d'une contraction (venturi). L'eau est mise en circulation par une pompe. La dépression se fait dans la contraction et la recompression se produit immédiatement en aval. Dans le programme Cavichoc, le fluide ne circule pas : la cavitation est provoquée par des phénomènes de propagation d'ondes de pression de type coup de bélier. Le Cremhyg est porteur du développement expérimental et de la réalisation de démonstrateurs de laboratoire. Cavhyte est un procédé utilisé pour traiter des eaux chargées en polluants volatils. Cavichoc, de son côté, est adapté aux polluants non volatils déposés sur des sédiments, tels que les PCB.